Rede PGA Kinshasa

11. Dezember 2009

Chers collègues parlementaires,

• C‘est un grand plaisir pour moi de m‘adresser à vous aujourd‘hui en tant que membre du Parlement de la Suisse, un État qui a ratifié le Statut de Rome de la Cour Pénal Internationale le 12 octobre 2001.

• Je dirai quelques mots de plus sur le processus de la Suisse dans l‘application des dispositions du Statut de Rome plus tard, mais tout d’abord permettez-moi de vous dire que c‘est un honneur pour moi de saluer le travail du Groupe de PGA dans le Parlement de la RDC. Ce groupe existe depuis que le premier Parlement démocratiquement élu au Congo a été fondé en 2007. Le groupe a depuis lors fait la promotion des objectifs du Programme de Droit International et Droits de l’Homme du PGA, qui unit les voix des parlementaires de 131 pays de toutes les régions du monde dans leur soutien à un fonctionnement indépendant et efficace de la Cour pénale internationale (CPI).

• L‘année 2009 revêt une signification particulière pour la Suisse: En effet nous célébrons cette année le 60ème anniversaire de la signature des Conventions de Genève. En tant qu‘Etat dépositaire de ces Conventions, la Suisse a derrière elle une longue tradition humanitaire. Un héritage que mon pays prend très au sérieux et aborde avec une grande responsabilité par des initiatives politiques proactives.  Le respect, la promotion et le renforcement du droit international humanitaire sont des objectifs clés de la politique extérieure de la Suisse.

• Dans le monde d‘aujourd‘hui, avec la mondialisation de l‘économie, du commerce, des marchés financiers et de la communication, l‘un des maillons manquants pour créer les conditions d‘un développement durable ainsi que la prospérité dans toutes les régions du monde est à mes yeux la mondialisation de l‘Etat de droit et de la justice pour la protection effective des droits fondamentaux des individus, des groupes et des populations vulnérables.

• L‘importance du renforcement de la justice nationale et internationale est une condition fondamentale pour un Etat de droit qui doit proteger les droits de l‘homme. Sans l’application de ces droits, les citoyens ne seront jamais les bénéficiaires directs du développement et de l’assistance internationale. Ainsi l‘impunité des crimes contre l‘humanité et des crimes de guerre crée un climat d‘impunité générale qui incite – plutôt que de prévenir – la corruption et l‘exploitation illégale des ressources naturelles et humaines. Si une telle tendance à l‘impunité n’est pas combattue, l‘aide au développement et la coopération sera un échec, car elle profitera avant tout à quelques individus qui contrôlent les flux de l’aide étrangère et non à celles et ceux qui en ont vraiment besoin.

• Lors de notre conférence, de nombreux orateurs de premier plan nous ont déjà rappelé et vont nous rappeler que la justice et la paix sont indissociables. Mais je tiens encore à souligner que la justice et le développement humain doivent également aller de paire. En conséquence seules la justice et la primauté du droit peuvent garantir la sécurité des relations commerciales et des investissements et ainsi lutter de manière efficace contre la corruption. Aussi longtemps qu’ un système ou qu’ un régime tolérera des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, le meurte, le viol, la corruption, c’est toute la société civile qui sera lourdement et injustement paralisée. Ainsi l‘impunité ne peut pas coexister avec le développement économique et humain.

Monsieur le Président:

• Le monde d‘aujourd‘hui se rapproche grâce à l‘interdépendance, l‘intégration et le respect mutuel. Aussi notre mandat en tant que législateur est de se connecter par dessus les frontières et d‘utiliser au mieux nos possibilités de coopération internationale et de multilatéralisme afin de résoudre les problèmes qu‘aucun de nous ne pourra résoudre seul dans son coin de pays.

• Aujourd‘hui, nous pouvons dire que la mondialisation de la justice a fait quelques avancées significatives. Avec la création de la Cour pénale internationale, c’est un nouveau message qui a été envoyé partout dans le monde. Aussi les génocides, les crimes contre l‘humanité et les crimes de guerre ne doivent non seulement être dénoncés, mais ils doivent être portés devant les tribunaux pour condamnation des auteurs.

• Par conséquent, renforcer la législation afin de sanctionner les crimes les plus graves, est un premier pas important vers une réforme visant à un système de justice efficace dans lequel tous les crimes doivent être empêchés et sanctionnés.

• Afin de briser le cercle vicieux de la violence et de l’impunité, la justice est donc existencielle. Les auteurs doivent être condamnés et surtout les victimes doivent obtenir justice et réparation.  C‘est le seul moyen de vivre ensemble et dans la paix.  Il ne peut y avoir de paix durable et de sécurité dans le monde sans l’application d’une justice internationale.

• La communauté internationale attend beaucoup de la Cour, car la Cour joue un rôle crucial dans la lutte contre l‘impunité et en faveur l‘application de la justice. Ce sont deux éléments vitaux dans la perspective d‘une paix durable, en particulier dans les situations qui suivent les conflicts.

• Cependant, la relation entre la Cour et ses États membres doit être caractérisée par la réciprocité. Non seulement les États ont des attentes élevées concernant les performances de la Cour, mais la Cour attend également beaucoup de ses États membres.  Le succès de la CPI est donc tributaire de la coopération entre les États. Comme la Cour n‘a pas de forces de police, ce sont donc les Etats qui doivent pleinement assumer la responsabilité de l‘exécution des mandats d‘arrêt, du soutien et de la promotion du droit international et de la justice pénale.

• Une coopération efficace des États membres avec la Cour est également nécessaire dans le domaine de la protection des victimes de crimes.  Conformément à l‘article 68 du Statut de Rome de la CPI, les États membres sont tenus de prendre des mesures adéquates de protection et de sauvegarde de (je cite) „la sécurité physique et du bien-être psychologique, de la dignité et l‘intimité des victimes et des témoins» (fin de citation). Ainsi il est de la responsabilité des autorités nationales de prévoir la possibilité de recours pour les victimes de crimes, notamment par l‘accès à la justice et aux réparations adéquates. Une société dans un pays post-conflit ne peut être reconstruite tant que des victimes d‘atrocités seront marginalisées. Nous aurons l‘occasion de discuter et d‘évaluer cette question importante au cours de notre conférence.

• Les objectifs des États membres du Statut de Rome sont conformes aux buts et aux principes des Nations Unies et sont de portée universelle. L‘universalité du Statut de Rome est fondamentale pour rendre effectif le système de la justice internationale. Et je suis conscient qu’il Il ya toujours beaucoup à faire. Malheureusement je constate que de nombreux pays dans le monde (environs 80) n‘ont pas encore adhéré au Statut de Rome de la CPI.

• S’agissant des pays membres il est donc essentiel de favoriser un fonctionnement efficace du système du Statut de Rome par la promotion de l‘application du principe de complémentarité. Promulguer une législation complète de mise en oeuvre dans les ordres juridiques nationaux est une condition préalable impérative à l‘application efficace et équitable du Statut de Rome et la meilleure base pour une bonne coopération avec la Cour.

• Monsieur le Président, permettez-moi de revenir brièvement sur le processus de mise en œuvre du Statut de Rome dans la législation suisse.

• Le 17 Juillet 1998, après cinq semaines de négociations intenses, le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) a été adopté par 120 nations. Il est entré en vigueur le 1er juillet 2002. La Suisse l’avait ratifié le 12 octobre 2001. L’objectif prioritaire du gouvernement suisse était d’affirmer la position de la Suisse en acquérant la qualité d’état membre de la CPI le plus rapidement possible. Dans son message relatif à la ratification du Statut de Rome, le gouvernement suisse s‘est donc concentré sur les travaux législatifs indispensables à la ratification du texte, c’est à dire la création d’une loi régissant la coopération avec la CPI et l’ adaptation des normes pénales concernant les atteintes à l’administration de la justice. Les autres modifications de loi auraient lieu dans un second temps.

Ce n‘est que le 23 avril 2008 que le gouvernement suisse a adopté un deuxième message sur la modification de la législation suisse pour mettre pleinement en œuvre le statut de Rome de la CPI. Il propose d’inscrire dans le code pénal et dans le code pénal militaire la notion de crimes contre l’humanité, inconnus aujourd’hui du droit pénal suisse, et d’y définir plus précisément les crimes de guerre. Par ailleurs, outre la redistribution des compétences entre la justice militaire et la justice ordinaire, il est nécessaire de faire des adaptations dans la procédure pénale fédérale et la loi sur l’entraide pénale internationale et de compléter la liste des infractions de la loi fédérale sur la surveillance de la correspondance par poste et télécommunication et de la loi fédérale sur l’investigation secrète.

La proposition du gouvernement a été transmise au Parlement. Le Conseil national a adopté la proposition le 4 mars 2009 avec quelques modifications mineures, la plupart d‘entre elles demandent un renforcement ou une aggravation des dispositions. Depuis cet automne, la Commission des affaires juridiques du Conseil des Etats examine le projet de loi. Sur la base de ces délibérations, elle fera des propositions à la plénière pour des changements dans le code pénal suisse.  Sur le fonds, le Conseil des Etats est en faveur de peines plus sévères que les a proposées le gouvernement et le demande le Conseil national.

• M. le Président, Mesdames et Messieurs, vous constaterez que même la Suisse avec sa longue tradition humanitaire a pris beaucoup (ou trop ?) de temps pour traiter la révision du code afin d’intégrer toutes les dispositions du Statut de Rome.

• La CPI, dans le cadre du système du Statut de Rome et de la justice pénale internationale, doit faire partie intégrante de toute stratégie de paix. Apporter son soutien à la CPI ne signifie pas seulement protéger les droits de l’homme, mais aussi et surtout reconnaître son rôle fondamental dans la résolution pacifique de conflits. C’est ainsi que je nous invite,  nous tous, à adopter rapidement nos dispositions légales.

• Je vous remercie de votre attention.